une rupture dans l'Histoire de la musique de film. C'est ce que je conteste
Mais il n'y a rien que tu puisses contester. Sauf à refuser, comme dans d'autres domaines, le principe d'une histoire de l'art de la musique de film. Après, on peut jouer sur le sens du mot rupture. Je vais te dire ce que j'entends par-là: à la truelle, on va dire que l'histoire de l'art s'écrit par une suite de ruptures et de continuités. Les ruptures sont souvent repérables, fréquemment à postériori, par des oeuvres innovatrices qu'on appelle souvent des oeuvres "avant-gardistes", et pour cause. Ce que j'appelle une rupture, c'est le moment où une oeuvre- pas forcément aussi originale que celle des avant-gardes l'ayant précédées- et permise- va provoquer un changement de paradigme esthétique dans un domaine. Pour ça, il faut qu'un partie significative (pas forcément en quantité, c'est compliqué !) des créateurs du domaine en question se mettent à suivre le mouvement à la suite de ce qui apparaît dès lors comme une rupture. Là, on parle uniquement de mouvement historique, sans entrer dans le débat sur la qualité de l'oeuvre, sa virtuosité savante, ou sa médicorité ignorante.
Ce débat là est dépassé depuis longtemps. Dans tous les domaines artistiques, il y a eu des ruptures provoquées par des rejets de la culture savante ou technique, ou les deux du domaine en question. Dans la peinture, évidemment, mais en musique aussi (Cage !), au cinéma c'est plus compliqué.
Parce que le cinéma est une industrie aussi, et surtout.
Et par rapport à la BO, l'avant-garde, c'est parfois de rejeter tout simplement le concept même de musique de film. On peut comprendre aussi le point de vue, un peu extrème, mais pas infondé, qui consisterait à ne voir dans la pratique de l'illustration musicale d'un film qu'un reste de la culture de l'opéra qui est un reflexe culturel d'arrière garde plutôt qu'autre chose.
D'ailleurs...
Quand à la musique de E.T., ce n'est pas plus mièvre ou passéiste que ne le sont les Symphonies de Beethoven ou les Poèmes symphoniques de Richard Strauss : ce sont au contraire des oeuvres intemporelles, qui traversent le temps et n'appartiennent à aucun effet de mode particulier, contrairement aux BATMAN de Zimmer, qui vieilliront très mal dans les années à venir, à coup sûr.
... Là j'en ai le souffle coupé, tant de lieux communs en une seule phrase... Allez, on va couper ça en petits bouts.
Quand à la musique de E.T., ce n'est pas plus mièvre ou passéiste que ne le sont les Symphonies de Beethoven ou les Poèmes symphoniques de Richard Strauss
Ah ben ça ça se discute quand même. Si, je te le dis franchement, E.T c'est quand même juste un peu plus mièvre que Ainsi parlait Zarathoustra, Im Abendrot ou les 4derniers lieders. Le retour que Williams fait faire à la musique de film à une écriture symphonique reposant sur le leitmotiv est passéiste, il prend racine dans des formes du passé, notamment la conception que Wagner avait de l'opéra. Mais dire que c'est passéiste ce n'est pas dire que c'est "mal",ou que c'est artistiquement répréhensible. Un jugement esthétique, ce n'est pas un jugement de valeur. Il s'agit juste définir les choses.
ce sont au contraire des oeuvres intemporelles, qui traversent le temps et n'appartiennent à aucun effet de mode particulier
ah ah ah. n'importe quelle personne qui a vu 4 films dans sa vie te diras en écoutant E.T que c'est typique des années 80. Et c'est vrai pour n'importe quelle musique de film- toi comme moi je pense que nous sommes capable de dater à 5 ans près n'importe quel score. l'écriture de Williams est tellement intemporelle, comme tu dis qu'il incarne à lui seul la musique de film américaine des années 80.
C'est typique de l'état d'esprit de certaines personnes d'aujourd'hui,
Comme qui ? Je veux des noms ! Tu n'as pas l'impression qu'au contraire, ce qu'on ne supporte plus aujourd'hui ce sont les formes d'art- et de discours- au contraire détachés de l'émotion ?
Ceux qui ont un problème avec ça doivent se poser de sérieuses questions à leur propre sujet !
Carrément ? Brrrr... Tu fous les jetons toi. Tu te trompes totalement. Je crois que le cynisme, c'est d'être capable de faire dégouliner de la violonnade sur un plan d'enfant qui pleure par exemple (éventuellement au ralenti), ou de faire pleurnicher trois notes de piano sur quelqu'un qui va, les yeux tous mouillés, affronter un funeste destin. Ceux qui pensent que l'émotion au cinéma, c'est ça, ont un sacré problème. 9 fois sur 10, je suis ému par une scène de cinéma, et dès que les violons déboulent (ou le piano, c'est pareil), j'ai envie de pendre le réalisateur. Pour refaire sourire Sam, je pense que Fincher a un traitement exemplaire de l'émotion dans ses films: voire la musique de Benjamin Button ou Millenium- et aussi à quel moment il n'y a PAS de musique. Se faire branler les oreilles par des violons pendant 10 minutes jusqu'à qu'on envoie les larmes, se n'est pas ressentir de l'émotion. J'adore la musique D'ET, entendons nous bien, mais dans le film, je pense qu'à beaucoup de moment, je serais plus ému SANS cette musique. Rassure-toi, je me pose plein de questions à mon sujet.
c'est d'ailleurs à cause de ce genre de mentalité que les producteurs U.S. ne veulent plus de grande mélodie ou de choses trop 'émotionnelle
Désolé l'ami, t'as encore tout faux. D'abord parce qu'encore une fois on parle de musique de blockbuster américain comme si toute la musique de film se résumait à ça. la manière actuelle dont sont illustrés les films ont plutôt à voir avec la manière dont on fabrique maintenant les films, surtout avec des montages vérouillés très tard, et des modifications extrèmement fréquentes, qui pousse à une écriture très maléable. Les cinéastes qui veulent imposer autre chose peuvent y arriver (JJ Abrams, certains gars de Pixar, Brad Bird...). "Des choses pas trop émotionnelles" - elle m'a fait pas mal rire celle -là. Au contraire, la musique de la plupart des blockbusters ne se réduit qu'à ça: de l'émotion au kilomètre, sursoulignée par les même gimmicks qui nous agaçent tous.
c'est d'ailleurs à cause de ce genre de mentalité
Tu veux dire tout ces froids spectateurs intellectualisant tout qui refusent de se laisser porter par l'émotion ?
Ce qui oriente les choix des producteurs, je ne t'apprends rien, ce ne sont pas les mentalités mais les entrées, parce que ça c'est palpable. Les mentalités, c'est autrement plus volatile. Le blockbuster de merde N°1, cette année, c'est un film sur une bande de cons de l'espace, bien émotionnelle comme il faut, qui commence par une des scènes les plus putassières et tire-larmes vu dans ce genre de film cette année- musique à l'appui. mais c'est sûrement moi qui est un problème.
C'est juste un film d'action qui reflète le désenchantement d'une décennie
Ce que tu dis de Dark Knight, Sam, c'est exactement ce qu'a été Star Wars: le film qui reflétait le désenchantement d'une décennie, celle des 70's, et qui y répondait.
THE DARK KNIGHT n'aura jamais l'impact culturel (et cinématographique, j'en parle même pas) d'une saga comme STAR WARS
Non, bien sûr, ne serait-ce que parce que Dark Knight existe dans une industrie cinématographique créer par Star Wars, et dans laquelle on vit toujours. N'empêche, Star Wars c'est le film de chevet de Nolan celui qui lui a donnée envie de faire du cinéma. Et Dark Knight, quoi qu'on pense du film est LE film de super-héros des années 2000, il a tout condensé: Maddof, les scandales bancaires, les interrogations sécuritaires de l'amérique, la question que pose l'action terroriste aux états démocratiques etc... en mettant en scène tout ça dans une imagerie totalement pop mais détachée de son esthétique originelle. Vraiment, il me semble difficile de contester que par la position qu'il occupe dans la pop culture THE DARK KNIGHT (la trilogie) est la plus proche de celle de Star Wars que bien d'autres aspirants (Matrix, Seigneur des Anneaux).
Et puisqu'on parle du Seigneur des Anneaux, voilà une musique très aboutie, que bien des lecteurs ici touveront tellement meilleur que celle d'un Zimmer, mais qui n'a aucun impact sur l'histoire de la musique de film. C'est comme ça !
D'abord parce que pour être une rupture, il faudrait que ce score n'ait pas eu de "précédents". Or, il y en a eu.
A commencer par Batman Begins, mais j'évoquais aussi le Blade de Isham, le X-Men de Kamen, mais aucun de ces disques n'a eu l'impact de Dark Knight. D'ailleurs, de là, Zimmer devient vraiment le mr Super Héros des années 2010, tout comme Elfman dans les 80's. Et quand on ne peut pas avoir l'original, on se paye une copie- voire l'analyse très juste de Alien7 sur le Captain America de jackman- un film tout péteusement pompé, d'ailleurs, sur Dark Knight. A l'image de Skyfall. Mais ceci est une autre histoire.
Autant après je ne peux accepter que tu fasses passer le sound design de l'ami-teuton pour quelque chose qui peut s'écouter en dehors des images (déjà qu'avec.....) !
ça on s'en fout, ce n'est pas la question. Une musique de film ne peut exister, littéralement, que si un producteur paye de quoi la fabriquer, et il le fait pour accompagner des images. Peut importe le reste... nous, nous sommes des pervers, c'est différent.
Bon, et le prochain qui vient me dire que j'ai écrit que c'est honteux de comparer Williams qui lui sait lire le solfège à Zimmer qui n'a rien fait de bien à part Radio Kills the video store, je lui envoie Van Cleef.